2017 : l’année d’un nouveau départ
Membre fondateur du Festival sans nom, en charge de la programmation des auteurs, le Mulhousien Hervé Weill sort la boîte à souvenirs. Retour en octobre 2017, alors que le festival prend ses marques à la Société industrielle de Mulhouse.
Cette édition 2017, c’est la première à laquelle votre parrain de la première heure, Roger Jon Ellory, ne prend pas part. Comment avez-vous ressenti ce « vide » ?
Ellory mettait un point d’honneur à venir chaque année chez nous. Comme il le dit régulièrement, pour lui, Mulhouse, c’est la famille. Et pour lui, c’était une évidence de venir. Mais ça ne l’a pas été en l’occurrence cette année-là pour sa maison d’édition, qui nous a expliqué qu’il était demandé un peu partout et qu’il n’y avait pas de raison qu’il vienne chez nous chaque année. En toute courtoisie. On a compris le message et on a décidé, d’un commun d’accord avec Ellory et sa maison d’édition qu’il ne participerait pas à cette édition.
Changement de taille, le festival change de lieu pour s’installer à la Société industrielle de Mulhouse…
Après avoir cherché un lieu unique, histoire de fédérer plus facilement, de passer d’une salle de dédicaces à une salle d’interview plus facilement, la Sim s’est montrée intéressée. Ils font peu de partenariats, nous avaient-ils expliqué à l’époque, mais ça leur paraissait sympa, un partenariat de qualité autour du polar, du livre. Ça représentait en tout cas quelque chose de prestigieux et on a pu s’entendre là-dessus. Ça nous allait bien, déjà parce que le bâtiment est magnifique, la salle de dédicaces était extraordinaire, avec ses hauts plafonds, ses tableaux… Les gens pouvaient rapidement aller dans la salle d’interview, ce qui nous permettait d’avoir pas loin de 100 personnes, si mes souvenirs sont bons. Et ils pouvaient facilement aller faire signer leurs livres, ce qui était plus compliqué quand les lieux étaient dispersés. Le seul bémol, c’était dans deux bâtiments distincts. Il fallait descendre d’un bâtiment puis remonter dans l’autre. Mais sinon, c’était vachement bien.
Ça n’a pas trop « perturbé » votre public ? Quel a été votre propre bilan, à l’issue du week-end ?
Je ne crois pas, au contraire. À partir de là, le public a adhéré. C’était la bonne solution, comme on nous l’a soufflé pendant longtemps. Et pour nous, c’était beaucoup plus simple en termes d’organisation. Quand on doit amener les repas ou les livres, c’est à cet endroit-là, le public n’est pas obligé de se disperser. C’est aussi plus simple d’avoir une caisse unique, une salle de dédicaces à côté d’une salle de tables rondes… On savait qu’on avait bien fait, il n’y avait aucun doute.
Une anecdote, quelque chose d’insolite, que l’on n’avait pas relevé à l’époque ?
Ce serait encore avec Jacques Pradel. Thierry Moser, le célèbre avocat mulhousien, devait faire une intervention chez nous au sujet de l’affaire Grégory. Il est un peu spécialiste, car il a défendu la famille Villemin. Malheureusement, il a eu un problème de santé et n’a pas pu venir. Il devait faire son intervention le dimanche et m’a envoyé un mot le samedi en disant qu’il était désolé. Ce sont des choses qui arrivent, bien qu’on sût que ça allait attirer du monde… Donc, j’ai demandé, un peu embêté, à Jacques Pradel s’il pouvait remplacer, au pied levé, Thierry Moser. Il m’a dit : « Écoute, moi, j’ai plein de choses dans mon ordinateur. Je vais potasser ça et on va faire quelque chose ». Effectivement, le lendemain, il a fait plus que ça, en abordant l’affaire sous un angle original : l’affaire avant l’affaire, la genèse de l’histoire. C’était juste ahurissant et passionnant. Il n’y avait pas de questions à poser. Pradel parlait et, encore une fois, c’est comme si on écoutait la radio. Il avait en tout cas pris le temps de préparer ça correctement, il s’était même démené pour nous sauver la mise.
Comment qualifierais-tu cette édition 2017, en fin de compte ?
Je dirais que c’était l’année d’un nouveau départ. Le festival est dans sa cinquième année, avec un lieu unique, donc on se structure, avec de nouveaux repères. Les fondations et la base sont bonnes, et l’état d’esprit reste le même. On peut encaisser les chocs, avec une structure souple et réactive qui nous a servi. C’était une étape, on a pris un an de maturité.
Propos recueillis par Pierre Gusz
Photo L’Alsace/Darek Szuster